2- Microbiote humain et santé – cours

Introduction : 

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Il n’y a que très peu de temps que le terme «Microbiote» est apparu. Fortement méconnu des professionnels et surtout du grand public, on le restreignait autrefois à la « flore intestinale ».

Mais deux innovations majeures, la recherche sur l’ADN et la bio-informatique, ont permis de découvrir que le microbiote est un écosystème complexe qui tient un rôle important pour l’organisme humain. Véritable communauté de micro-organismes, il siège le long de nos muqueuses internes et couvre également notre peau. Il constitue en quelque sorte un « biofilm » en interaction avec nous et l’extérieur.

Problème : Comment définir le microbiote ? Quels relations existent-ils entre un être humain et son microbiote  ? Existe-t-il des différences entre humains ? Le microbiote peut-il évoluer dans le temps, peut-il guérir certaines pathologie ?

I- Définition, composition et rôle du microbiote

A- Définitions

Symbiose : Association étroite de deux ou plusieurs organismes différents, mutuellement bénéfique, voire indispensable à leur survie.

Microbiote : Le microbiote est l’ensemble des micro-organismes (bactéries, microchampignons, protistes, virus) vivant dans un environnement spécifique (appelé microbiome) chez un hôte (animal : zoobiote ; végétal : phytobiote ; aérien : aérobiote) ou une matière (d’origine animale ou végétale).

B- Composition du microbiote humain

En fonction de l’environnement concerné (peau, intestin, organes sexuels, bouche…), il existe différents microbiotes…  C’est le microbiote intestinal qui est le plus important, avec environ 1013 micro-organismes. Il y aurait presque autant de bactéries microbiotes intestinaux que de cellules humaines par humain !

Doc 1 : Densité et activités des bactéries du colon

D’après : http://acces.ens-lyon.fr/

Notre intestin héberge ainsi des milliards de bactéries d’espèces différentes réunies en famille, mais ces microorganismes ne sont pas seuls, ils cohabitent avec des champignons, des virus, des archées et parfois même des parasites. Le microbiote intestinal regroupe entre 500 à 1000 espèces de bactéries qui appartiennent majoritairement à deux groupes bactériens (ou phyla) : les Firmicutes et les Bacteroidetes.  

Bactérie : Micro-organisme procaryote formé d’une seule cellule, sans noyau, à structure très simple

Archée : Micro-organisme procaryote différent d’une bactérie dans la constitution de leurs molécules

Virus : Un virus est un agent infectieux  non vivant nécessitant un hôte, souvent une cellule, dont il utilise le métabolisme et ses constituants pour se répliquer.

Doc 2 : Les espèces bactériennes appartiennent à différents sous-ensembles de groupes bactériens

D’après https://www.encyclopedie-environnement.org

Attention, il ne s’agit que des grandes familles bactériennes, ce qui ne comprend les espèces les moins abondantes, ni les espèces non bactériennes (champignons, protistes, virus…)

C- les actions bénéfiques du microbiote pour son hôte

Les différentes actions bénéfiques du microbiote , même si elles peuvent être diversifiées, se déclinent en 3 fonctions principales. Selon l’endroit considéré, il peut assurer ces 3 actions ou 2 :

Rôle dans la digestion

  • Il agit sur la maturité du système digestif, comme par exemple sa motilité (péristaltisme) ou son système circulatoire et endocrinien.
  • il assure la fermentation des substrats et des résidus alimentaires non digestibles
  • il facilite l’assimilation des nutriments grâce à un ensemble de molécules dont l’organisme n’est pas pourvu (diversité de gènes du microbiote > au nombre de gènes humains)
  • il assure la fragmentation de grosses molécules (polysaccharides…)
  • il régule plusieurs voies métaboliques : absorption des acides gras, du calcium, du magnésium…

Rôle dans la fourniture de molécules essentielles aux cellules de notre organisme

  • Il permet la synthèse de certaines vitamines (vitamine K, B12, B8)
  • Emission de molécules importantes au maintien de l’équilibre chimique de nos cellules

Rôle dans la défense de notre organisme contre les pathogènes

  • Il maintient la fonction de la barrière naturelle que sont nos muqueuses
  • Il agit contre la colonisation du tube digestif par des germes pathogènes (lutte active)
  • Certaines bactéries sécrètent des molécules anti-inflammatoires permettant de protéger des MICI (maladies inflammatoires chroniques intestinales). 
  • Il permet la maturation du système immunitaire
  • Il interagit avec notre cerveau et un déséquilibre peut être à l’origine de troubles nerveux.

…/…

II- Variations du microbiote

A- En fonction des individus

La diversité spécifique du microbiote va varier d’un humain à l’autre. Les biologistes peuvent donner cette diversité par l’analyse des génomes du microbiote (ARN16s). Un catalogue quantitatif du microbiote est dressé et à la grande surprise générale, les analyses montrent qu’il n’existe pas 2 microbiotes identiques.

Doc. 3 :  comparaison du microbiote d’un africain et d’un européen

J. Boscq d’après Filippo & Al. 2010

Il y aura alors plusieurs possibilités de variations entre individus. Prenons le microbiote intestinal comme exemple, il pourra varier pour un individu selon : 

  • les coutumes locales ou régionales
  • son régime alimentaire, ses goûts alimentaires (1)
  • son état de santé (2) et l’utilisation de médicaments (antibiotiques…)
  • son âge
  • son environnement de vie (compagnons, animaux…)

Pour (1) et (2), la relation est réciproque : le microbiote peut influencer les goûts alimentaires de l’individu et son état de santé.

B- En fonction des tissus

Notre microbiote n’a pas la même composition en fonction de l’endroit du corps considéré

Doc. 4 : Différences de microbiotes bactériens en fonction de sa localisation au niveau des tissus

Si cela parait évident pour les différences entre le microbiote intestinal et cutané par exemple, la différence semblait moins évidente entre 2 zones de peau ou 2 zones d’intestin. Elle est pourtant considérable. Les différences s’expliquent par des conditions différentes du milieu.

Doc. 5 : Différence de microbiotes en fonction de l’endroit de l’intestin et des paramètres physico-chimiques.

D’après : https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01887087/document

C- Acquisition du microbiote

Le nouveau-né, stérile in utero, se trouve dés la naissance plongé dans un univers microbien riche et se colonise rapidement avec une flore simple à partir des flores de sa mère et de l’environnement proche. Le nouveau-né est ensuite continuellement exposé à de nouvelles bactéries provenant de l’environnement, de la nourriture et des bactéries cutanées des adultes via les tétées, les caresses ou les baisers. Une flore complexe et stable, proche de celle de l’adulte, ne semble être obtenue  qu’entre 2 et 4 ans

Flore microbienne : ensemble des micro-organismes vivant dans les tissus et les organes

Doc. 6 : Evolution du microbiote intestinal en fonction de l’âge   

III- le microbiote et notre santé

Nous savons depuis longtemps que notre microbiote influe sur son microbiome. Mais ce qui a été découvert récemment va au delà, car le microbiote interagit avec nos cellules pour modifier notre comportement alimentaire et même notre santé au delà du simple microbiome. Ainsi, quand le dialogue est perturbé, les troubles et les maladies se manifestent.

A- Exemple de l’obésité

L’obésité toucherait près de 700 millions de personnes à travers le monde. Les causes premières de cette épidémie sont dues à une vie sédentaire, une nourriture plus riche en énergie et facile à se procurer et aussi à certaines résultantes génétiques. 

Mais plusieurs études montrent que des individus ont aussi un déficit en bactéries intestinales (appauvrissement de la diversité) avec un risque accru de développer des complications liées à l’obésité. Les espèces bactériennes manquantes pourraient bien donc avoir un rôle contre la prise de poids.

Doc. 7 : Expériences de mise au régime d’individus obèses.

Dernièrement, une équipe a observé les résultats d’un régime riche en protéines et en fibres et pauvre en calories. Après six semaines, si la perte de poids, de graisse et la modification des paramètres métaboliques sont bien au rendez-vous en général, la réponse est moins bonne ou nulle chez les individus montrant une faible richesse bactérienne de l’intestin. Avec l’étude du microbiote, le diagnostic des individus présentant un risque d’obésité est désormais possible. Mieux, le transfert de microbiote pourrait soigner certaines personnes obèses.

Doc. 8 : Expériences de transfert de microbiotes entre jumelles, ou de partage d’environnement.

B- vers de nouvelles pistes de soin pour quelques maladies

Certaines pathologies sont associées à un déséquilibre du microbiote ou dysbiose, notamment au niveau intestinal.  En effet, en fonction de la richesse en certaines espèces, les déséquilibres métaboliques peuvent être à l’origine de sécrétions de molécules qui engendrent des troubles à différents niveaux. 

Doc. 9 : Interactions de métabolites sécrétés par des microorganismes au niveau intestinal.

d’après https://www.leem.org/le-microbiot

Différentes expériences réalisées ces dernières années permettent d’avoir des espoirs de soins comme par exemple dans les Maladies Inflammatoires Chroniques Intestinales (MICI), le Diabètes de type 2, dans certaines maladies neurodégénératives (Alzheimer, maladies de parkinson…) ou neuropsychiatriques (autisme, anxiété et dépression)…

Une analyse du microbiote va permettre de rendre plus précis et surtout plus précoce le diagnostic de certaines maladies. Mais surtout, les perspectives de thérapies tant au niveau de la prise en charge des patients que de la recherche de nouveaux traitements est révolutionnée par la compréhension de l’interaction avec notre microbiote. 

Conclusion

d’après J.Boscq
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