L’Histoire de l’âge de la Terre – Cours
Introduction :
La Terre a un âge et cet âge a évolué au cours des temps. Estimé à 4000 ans avant J.-C. à la Renaissance, il évoluera à quelques dizaines de millions d’années à la fin du 19e siècle. Aujourd’hui fixé à 4,57 milliards d’années, comment notre planète a-t-elle pu vieillir de plus de 4 milliards d’années en 400 ans ? Tous les savoirs depuis la théologie, la philosophie. l’histoire, les mathématiques, la physique, la chimie et la géologie ont pu participer à la construction de la réponse.
Photo de couverture : d’après J.boscq L’Histoire de l’âge de la Terre – Cours
Problèmes : Quel âge a la Terre ? Comment la détermination de l’âge de la Terre a-t-elle évolué en fonction des courants d’idées et des savoirs scientifiques ?
I- Des croyances aux positions dogmatiques
Rappel : La Terre fait partie des 8 planètes du Système Solaire et appartient au groupe des planètes telluriques. La formation des planètes suit celle du Système Solaire. L’idée ici, est de rappeler comment la détermination de l’âge de la Terre a évolué au fur et à mesure de l’histoire des Sciences.
A- l’antiquité et les mythes (attention ceci est un supplément et ne fait pas partie des objectifs du programme)
L’Égypte antique, avait plusieurs récit de la création du monde, selon des Divinités qui apparaissant comme créatrices. Dans la mythologie grecque, Gaia, la Terre mère, est une enfant du Chaos et est à l’origine de la terre des montagnes et des océans.
Dans la mythologie nordique, c’est en tuant Ymir puis à partir de sa chair qu’Odin, Vili et Vé créèrent la Terre.
Quelles que soient ces mythologies, l’origine de la Terre n’est pas datée.
Par contre dans la religion Maya, la création du Monde est datée à 16,4 Millions d’années, un temps étonnamment long (sytème de décompte du temps en multiple de 20, basé sur un cycle solaire = compte long). A l’origine, la Terre, création divine était sans être vivant, et n’était qu’une vaste étendue déserte. Ce sont aussi les divinités qui installèrent les êtres vivants par la suite. La fin du Monde était prévue en 2012.
Alors qu’Aristote, philosophe grec (382-324 av. JC), croyait en un monde éternel et non créé, dans les religions monothéistes (Judaïsme, Christianisme et Islam), la genèse est le récit de la création de la Terre et des êtres vivants. Dieu crée un monde à partir du chaos, tout en mettant l’homme à l’apogée de son œuvre (et tout ceci en 7 jours). Croire en cela relève d’un mouvement qu’on appelle le Créationisme qui encore aujourd’hui s’oppose aux théories de l’évolution.
B- Les positions dogmatiques à la Renaissance
Définitions :
Dogme : Point fondamental et considéré comme incontestable d’une doctrine religieuse ou philosophique, l’ensemble de ces points constituant une doctrine. – Larousse
Pour les savants de la Renaissance, le récit biblique est incontestable, et est la seule base de calcul possible. Dans leur très grande majorité, les analystes du récit biblique situent la date de la Création, en chiffres ronds, à 4 000 ans avant l’ère chrétienne. C’est entre autre en 1654, le théologien James Ussher estime la création de la Terre à plus de 5000 ans et s’impose comme seule vérité. Son raisonnement s’appuie néanmoins sur une méthode et consiste à compter le nombre des générations qui se sont succédées depuis Adam jusqu’à Jésus en passant aussi par des écrits historiques. Il avance même la date de la création du monde de façon précise : le dimanche 23 octobre 4004 av JC.
Cependant, des dissonances au dogme chrétien apparaissent comme par exemple grâce à l’observation deLéonard de Vinci observant des fossiles et remettant en cause l’âge de la création.
II- L’évolution de l’argumentation scientifique permet de rallonger l’âge de la Terre
Selon les différents arguments employés, à partir du 18e siècle, les scientifiques vont se livrer à différentes controverses.
A- L’argumentation issue du refroidissement de la Terre initialement en fusion
Définitions :
Controverse scientifique: Discussion soutenue ou débat avançant des arguments scientifiques sur une question donnée, opposant généralement des opinions ou des interprétations divergentes.
- Georges Louis Leclerc, comte de Buffon , en 1774, commence à expérimenter pour déterminer l’âge de la Terre. Il travailla sur des boulets de canon incandescents se refroidissant, partant de l’hypothèse que la Terre était incandescente et s’est refroidit par l’extérieur. Buffon s‘appuya aussi pour ce faire sur la circonférence connue depuis Eratosthène. Il calcula alors que la Terre devait avoir environ 100 000 ans.
Complément d’info : La force de Buffon a été d’appliquer une démarche expérimentale qui a été reproduite inlassablement pendant 6 ans sur des boulets de canon. Puis il extrapole à la taille de la Terre. Cependant, c’est aussi sa faiblesse, car en s’étant fixé sur des structures métalliques, il n’est pas proche de la structure rocheuse.
- Lord Kelvin (1868-1897) a poursuivi cette idée près d’un siècle après Buffon de refroidissement à partir d’un corps en fusion et calcula ainsi la durée nécessaire à la dissipation d’énergie thermique de la terre depuis sa formation. Il avança des arguments physiques (en liaison avec la texture rocheuse) et utilisa un modèle mathématique, utilisant l’équation de Fourier. En améliorant considérablement le modèle de Buffon, il calcula un âge allant de 20 à 100 MA (106). Seulement, le modèle géologique n’est ni statique, ni homogène (zones volcaniques), et surtout, la terre fournit sa propre chaleur par radioactivité (origine principale de la géothermie).
B- L’argumentation issue des processus d’altération des roches et sédimentaires
1) La stratigraphie et les vitesses de sédimentation
A la fin du XVIIe siècle, l’étude de la superposition des couches géologiques et leur histoire commence à intéresser les scientifiques. C’est à la fin du 18e et surtout durant le 19e siècle que la stratigraphie sera utilisée pour essayer de déterminer l’âge de la Terre. Charles Lyell (1797-1875) en est l’un des fameux représentants (et ami de Darwin).
Le principe est le suivant : à partir de la vitesse d’un ou plusieurs dépôt(s) sédimentaire(s) et si on connait la vitesse de dépôt du sédiment, on peut extrapoler pour connaître la durée totale de formation d’une couche géologique. On peut même extrapoler à l’âge de la Terre.
Définitions :
stratigraphie: Description des strates, ou couches de terrain, qui constituent l’écorce terrestre dans le but de reconstituer l’histoire de celle-ci.
A partir de ces études, et selon leurs auteurs, les âges de la Terre vont fortement varier, mais surtout ils se rallongent considérablement. Les datations vont osciller de dizaine de millions d’années à même 1,6 GA calculé par William John Mc Gee (1853-1912).
Critique : Cette approche n’est pas correcte non plus, car elle ne prend la Terre que comme un vaste dépôt sédimentaire. Elle a cependant le mérite de montrer que les temps géologiques sont des temps longs.
2) L’approche par l’érosion et l’approche naturaliste
Charles Darwin (1809-1882) eu l’idée d’appliquer la même méthode en calculant les vitesses d’érosion et non de sédimentation. Il travailla notamment sur la vallée du Weald montrant une érosion des roches sédimentaires déposée en strates.
Il fit le rapprochement entre les temps longs de dépôts sédimentaires et les temps d’érosion. Surtout, il intégra sa théorie de l’évolution et vit que dans certains dépôts se trouvaient des fossiles n’existant plus aujourd’hui. Il estima que les temps d’évolution étaient tout aussi longs. De même, que la biodiversité actuelle ne devait pas s’être créée en peu de temps. Or certaines couches géologiques ne possédaient que quelques représentants d’espèces et pourtant sur des temps longs. Sa conclusion était que la Terre devait avoir un âge forcément supérieur à ce que ses contemporains proposaient. Il l’estima à plus de 300 millions d’années. Mais, on lui reprocha entre autre sa théorie de l’évolution et fut attaquer pour manque de preuve physique ou chimique de ce qu’il avançait. La génétique ne viendra à la rescousse de Darwin qu’au 20e siècle.
3) La salinité des océans
Edmund Halley (1656-1742) avança que les océans n’avaient pas toujours été salés et que la salinité s’est acquise par le transport de solutés (ions) des rivières et des fleuves se concentrant ainsi au niveau des océans. Il supposa à son époque, par ce simple constat, que les âges de la Terre proposés à son époque devaient être erronés et plus grands.
Mais c’est John Joly (1857-1933) qui exploita cette idée afin de proposer un calcul à partir de l’évolution de l’apport en chlorure de sodium (sel). En ayant estimé la masse de sel des océans et les apports par les rivières et fleuves, il aboutit à la conclusion que l’âge de la Terre devait être proche de 100 Millions d’années.
Critique : Le problème est que la salinité est stabilisée depuis longtemps par des pertes qui compensent les apports (Fluctuations de salinité : vents, sédimentation, congélation, volcanisme…).
C- Les apports de la radioactivité
Le début du XXe siècle marque le début des découvertes en matière de radioactivité. Ainsi, Henri Becquerel (1852-1908), Ernest Rutherford (1871-1937), Pierre (1859-1906) et Marie Curie (1867-1934)montrent que des isotopes radioactifs se désintègrent spontanément en d’autres isotopes, qu’on qualifie de radiogéniques.
Grâce aux lois de désintégration atomique, il est possible de modéliser l’évolution des quantités d’un isotope père en isotope fils. On peut ainsi déterminer la demi-vie T à laquelle la moitié de la quantité d’un isotope père se sera désintégré en élément fils (autre moitié).
Complément :
Comme on voit que la décroissance de l’élément père (ou la croissance de l’élément fils) dépendent du temps, il est possible de définir son équation. Cela nous permet de calculer le temps à l’origine et donc l’âge de l’élément étudié. Seulement le calcul dépend aussi des matériaux étudiés et des taux d’éléments père et fils à l’origine. C’est pourquoi généralement (mais cela dépend des isotopes choisis) on définit une équation de type :
Ftotal mesuré = Fradiogénique + F0
Où F0 = F existant au départ
On obtient alors une équation de type Y = aX + b
Oua correspond au coefficient directeur de la droite et permet de calculer l’âge de l’objet étudié.
Généralement a correspond à l’équation de désintégration de l’élément père ou de l’apparition de l’élément fils et b à une concentration initiale de l’isotope à l’origine, ce qui permet de retrouver l’âge.
Ainsi, grâce aux isotopes radioactifs, radiogéniques et stables que contient une roche, cette dernière peut être datée en obtenant une droite appelée isochrone. On parle alors de véritables géochronomètres. C’est cette méthode que va utiliser Clair Patterson (1922-1995), mais au lieu d’utiliser un couple d’isotopes pour dater une roche il va en utiliser 2 (238U/206Pb et 235U/207Pb) et va à la fois les utiliser pour des sédiments, mais aussi pour des météorites. Il va obtenir alors un géochrone où les points sont parfaitement alignés, prouvant que les météorites et la Terre ont le même âge, qu’il va estimer à 4,55 GA. Cet âge sera par la suite affiné à 4,57 GA.
Conclusion :
La méthode utilisée par Clair Patterson met fin à une controverse scientifique vieille de près de 400 ans. Elle a permis de mettre d’accord la communauté scientifique, parce qu’elle fait le lien entre la Physique Chimie, les Mathématiques et la Géologie. Ainsi aujourd’hui les roches sont datées avec précision et nous permettent de voir la relative jeunesse des océans (au plus 180MA) par rapport aux continents (certaines roches en surface ont été datées à 4,2 GA).
Que nous apporte la controverse ? Que toute vérité scientifique peut être infirmée par une remise en question des hypothèses grâce à de nouvelles observations, de nouveaux faits ou de nouvelles théories scientifiques. C’est ainsi que les sciences avancent et se construisent, jusqu’à stabiliser les savoirs.
SCHEMA BILAN :